Avec l’exposition Trajets de lumière, la Galerie Maria Wettergren propose un dialogue inédit entre deux artistes français de la photographie cinétique : Rodolphe Proverbio (1938 ) et Etienne Bertrand Weill (1919 – 2001).

En 1963, Rodolphe Proverbio vient montrer ses premières créations optico-lumineuses à Etienne Bertrand Weill, de vingt ans son aîné, qui l’encourage à continuer dans cette voie. Depuis 1957, ce dernier expose les « métaformes », fruit de recherches entreprises depuis 1946 pour rendre, en une seule image, l’atmosphère de la scène (Mime, Danse et Théâtre). Les deux artistes suivent chacun leur chemin et ne se rencontreront que lors d’expositions, en particulier dans le cadre de « Libre Expression ».

Les deux artistes conçoivent et construisent des « outils générateurs » pour créer leurs images, qui n’apparaissent pas explicitement (RP) ou disparaissent (EBW) dans l’œuvre finale, et les soumettent à un mouvement (intervention du temps, de la durée). Cette phase de conception – réalisation artisanale, ajoute à la qualité esthétique et poétique du résultat le caractère unique (non reproductible) dont l’absence a longtemps constitué un obstacle à la reconnaissance de la photographie comme art.[1]

L’écriture des Métaformes procède de la mise en scène théâtrale : le performeur est un mobile situé dans l’espace, éclairé par une ou plusieurs sources lumineuses qui ne se révèlent que lorsque le mobile leur présente sa matière pour se réfléchir.

A l’aide de boîtes percées de trous ou autres objets emplis de lumière, Rodolphe Proverbio tisse de son côté des fils de lumière dans une gestuelle qui engage tout le corps, comme une danse. Telle une calligraphie à l’aveugle, le dessin s’effectue dans l’obscurité.

Si l’un écrit avec la lumière incidente, l’autre joue avec la lumière réfléchie. Est-ce à dire que leur réflexion, leur inspiration les oppose ? Pas vraiment car l’un comme l’autre crée une partition visuelle en dialogue avec la musique, proches, en cela, du travail de Iannis Xenakis (Polytope).

Cette démarche montre le rapport fructueux qui naît de la synthèse entre technique (industrie) et art (architecture, peinture, photographie). Xenakis, architecte devint musicien comme Proverbio ingénieur, photographe. De l’autre côté Weill, photographe de raison, musicien et plasticien par goût mène des recherches sur la physique des corps.

Photographe de théâtre, Weill cherchait à saisir le dernier moment de déséquilibre, celui où le spectateur « peut encore douter ». En remplaçant le corps par des mobiles générateurs (abstraction), le photographe exprime son désir d’offrir au spectateur une image qui ne lui impose rien et lui donne la possibilité d’y projeter ses propres rêveries, pensées, fantasmes.

En laissant ouvert l’objectif pour une pose plus ou moins longue, Weill montre un événement : au théâtre, il le choisit après l’avoir repéré, pour les Métaformes il le crée de toute pièce, comme Proverbio quand il anime ses objets-outils.

Introduisant ainsi le temps dans l’image fixe, l’artiste nous révèle ce que nous ne voyons pas, une trajectoire, autrement dit, un objet en devenir et en évolution.

C’est la phase où les formes sont en gestation dans l’eau, encore imprécises, mais chargées de toute l’énergie qui va les faire éclore, nous dit Rodolphe Proverbio d’une série de travaux, entamé en 1967, portant sur ce qu’il appelle Esthétique de l’eau : des photographies d’éléments géométriques simples prises à travers une lentille remplie d’eau.

 

Titre : Trajets de lumière. La photographique cinétique d’Etienne Bertrand Weill (1919 – 2001) & Rodolphe Proverbio (b. 1938)

Dates : 3 Novembre 2016 – 21 janvier 2017

Lieu : Galerie Maria Wettergren, 18 rue Guénégaud 75006 Paris. Téléphone : 01 43 29 19 60 / info@mariawettergren

 

[1] Même si tout est pensé, calculé et prévu, il reste une part voulue d’aléa, de choix de l’artiste au dernier moment

  • Rodolphe Proverbio & Etienne Bertrand Weill / Trajets de Lumière
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